retraites : non, mais « à l’eau », quoi !

Une nouvelle réforme des retraites se trame pour la rentrée de 2013 et le gouvernement élu de gauche entend, comme ses prédécesseurs de droite, marquer de son empreinte un nouveau recul social.

Sous couvert de réalisme et d’une prétendue responsabilité politique, le gouvernement envisage en effet, dès septembre, un nouveau projet de loi avançant les mêmes pistes qu’en 2003 et 2010 : allongement de la durée de cotisations, recul de l’âge de départ à la retraite et baisse significative des pensions. Si les ingrédients sont tenus secrets, la recette elle est bien connue : on invite les partenaires sociaux à dialoguer (et certains s’y sentent forcément à leur aise), on saupoudre de déclarations sur les inégalités public/privé histoire de chauffer la salle, on s’appuie sur les conclusions d’experts et de rapport acquis à la cause (COR, Moreau), on donne quelques chiffres qui agressent l’oreille (20 milliards d’euros), on précipite la réflexion pour éviter le débat public et hop, l’affaire est dans le sac…

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Pourtant, cette question des retraites n’est pas réservée aux seuls initiés et l’unique préoccupation des actifs proches de la quille ou des actuels pensionnés. Tout le monde est concerné directement ou indirectement et c’est un véritable débat de société qu’il convient de mener.

La retraite est en effet un progrès social qui a fait l’objet de nombreuses luttes et il est fondamental pour une société que cette période se vive dans les meilleures conditions possibles que ce soit en termes de ressources, de santé et de prise en charge. Si les avancées médicales ont permis de vivre plus vieux et d’être plus nombreux, il faut contribuer indéniablement à affecter une partie de la richesse créée au financement des régimes de retraites.

Dans un contexte de crise et d’austérité, c’est de la responsabilité de l’État de faire des arbitrages justes pour un meilleur partage des richesses prenant en compte cette augmentation des dépenses à la hauteur des besoins démographiques. Le déficit actuel s’explique par la récession, conséquence des politiques de réduction des dépenses publiques et de la baisse du coût du travail menés par les gouvernements successifs. Une nouvelle participation des salariés pour combler le déficit et atteindre l’équilibre financier en 2020 serait, en plus d’être improductive, inacceptable. C’est en effet du côté des politiques de l’emploi qu’il faut chercher des solutions car toute baisse du chômage augmente ainsi la masse de cotisations payées par les salariés et le patronat et entraine la diminution des déficits de tous les comptes sociaux (assurance maladie, chômage, retraites).

Des chiffres  : Pour équilibrer notre système de retraites par répartition, il faudrait 20 milliards d’euros d’ici 2020. A titre de comparaison, 20 milliards d’euros c’est :

  • 1 point de PIB ;
  • l’équivalent du crédit d’impôt accordé en novembre 2012 par le gouvernement aux entreprises dans le cadre du pacte de compétitivité ;
  • c’est ¼ de la fraude fiscale estimée à 80 milliards par an. alors que les réformes menées depuis 25 ans qui ont mis à contribution les seuls salariés (allongement de la durée de cotisation, recul de l’âge de départ, instauration d’une décote, augmentation du nombre d’années prises en compte) représentent 40 milliards d’euros.

Augmenter le temps passé au travail en reculant l’âge de la retraite, c’est sacrifier délibérément les jeunes générations dans leur accession au marché de l’emploi alors qu’elles sont largement éprouvées par le chômage et de plus en plus exclues des protections sociales. Aujourd’hui, l’âge moyen d’entrée dans le monde du travail est 25 ans et le taux de chômage des jeunes de moins de 25 ans est estimé à 24,6%, chiffre en progression régulière. Paradoxalement, au moment de la validation de leur droit à pension, un salarié sur deux est hors emploi (à 59 ans, un senior sur deux est hors travail pour cause de licenciement ou raison de santé). Quant à l’espérance de vie en bonne santé, elle est de 63,1 ans et elle recule.

Allonger la durée de cotisation et maintenir les salariés les plus âgés en activité, c’est donc la double peine assurée :

  • en sacrifiant une politique d’emploi des jeunes et en repoussant l’espoir pour eux de bénéficier demain d’un système de retraite par répartition ;
  • en engendrant une retraite plus tardive et des pensions plus faibles pour toutes et tous.

Opposer public/privé est fallacieux car le niveau de pension des salariés du privé et de la fonction publique est identique pour des emplois comparables. Seules les méthodes de calcul divergent. Remettre en cause le dernier salaire comme référence dans le public baisserait de façon très importante les pensions de la fonction publique dont les salaires sont nettement inférieurs au privé. La volonté d’alignement est la même qu’en 1993 (avec le passage aux 25 meilleures années pour le calcul des pensions du secteur privé) en entrainant à la clé une baisse significative du pouvoir d’achat des retraités sans revalorisation possible.

Inégalités hommes/femmes : le système actuel de calcul de retraites aggrave les inégalités de la vie professionnelle entre hommes et femmes et tout allongement du nombre d’annuités va encore accentuer cette situation. (Aujourd’hui les femmes valident 12 trimestres de moins et la différence en moyenne de pensions Femmes/Hommes est de 33%).

Pour finir, il n’est pas inutile de rappeler que la solidarité, principe fondateur du système actuel de retraite par répartition, reste par le salaire socialisé le meilleur dispositif pour garantir un accès à la retraite et un niveau de pension pour tous.

Ce système de solidarité intergénérationnelle avec des intérêts communs entre jeunes et moins jeunes, entre salariés et dans des métiers différents est un contrat social implicite permettant de laisser la place à l’emploi des jeunes générations. Par ailleurs, en fonctionnant en dehors des marchés à la différence de la capitalisation volontaire, il est le plus sécurisé dans une économie capitaliste sans risquer d’effondrement financier.

Nous avons des solutions  :
  • en finir avec les exonérations de cotisations sociales des entreprises pour alimenter les caisses de la sécurité sociale et les retraites (de 8 à 10 milliards d’euros) ;
  • réduire le temps passé au travail et mieux le partager ;
  • mettre en œuvre des politiques d’emploi en particulier pour la jeunesse ;
  • accroitre le taux d’activité des femmes en l’alignant sur celui des hommes (+ 5% de
    recettes pour les cotisations) ;
  • réaliser l’égalité professionnelle en faisant disparaitre l’écart de salaire ;
  • élargir les cotisations patronales à l’ensemble des revenus distribués par les entreprises en dehors des salaires (dividendes, stock-options, bonus, intéressement..)

SUD Solidaires appelle donc le personnel à manifester le

mardi 10 septembre


en revendiquant :

  • une retraite calculée sur le meilleur salaire sans pénalités ni décote avec le retour aux 10 meilleures années pour les salariés du privé et le maintien du calcul sur les 6 derniers mois pour les fonctionnaires ;
  • un départ à la retraite à 60 ans sur 37,5 ans de cotisations pour une retraite à taux plein.